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                                                                     Gabriel Boric                         

 

Les "communistes orthodoxes" (oxymore qu'on voudra bien nous excuser) tentent de donner, sur leurs sites et blogs,  un écho aux propos du petit-fils du président Allende qui a écrit une lettre au président élu du Chili lui reprochant son "irresponsabilité" et son  "immaturité" politiques "qui peuvent vous transformer en un idiot utile pour la droite, ou pire, vous faire finir par être cette "gauche" dont la droite a envie : une gauche stupide et ambiguë, une gauche inoffensive qui, en raison de l’opportunisme, préfère apparaître comme "politiquement correcte", une gauche tiède qui ne veut avoir de problèmes avec personne".

L'attaque est rude. Et si elle pose des questions on ne peut que se souvenir de Lénine qui disait qu'un imbécile peut poser dix fois plus de questions qu'un sage ne peut apporter de réponses. Cette mise en cause est-elle fondée ? Bien sûr comme toute critique argumentée. Mais les commentaires qui accompagnent ce point de vue sont beaucoup plus discutables et tendancieux.

Il nous semble qu'être "irresponsable et immature" commence lorsque l'on prétend "regarder en face" les positions de Gabriel Boric sur..."la dictature du prolétariat". C’est-à-dire "de la nécessaire fermeté à l’encontre de la réaction et de l’impérialisme". On se demande dans quel monde "regarder en face" une situation consiste, au Chili, en 2021, bientôt 2022, avec les rapports de forces tels qu'ils sont en interne, où gauche et pinochetisme sont à égalité et où une très large fraction des classes populaires s'est abstenue, et au niveau international, où les forces impérialistes se livrent entre elles à une rivalité acharnée, consiste donc à bavasser sur la dictature du prolétariat. Car il s'agit bien de cela étant  donné que rien dans la situation concrète au Chili ne permet à des gens rationnels de poser la dictature du  prolétariat à l'ordre du jour (à supposer que cela soit envisageable un  jour).

Et, qui plus est, de dire que " L’expérience chilienne des années 70, où l’équivoque de la gauche sur ces sujets a coûté au peuple chilien 50 ans de souffrances, reste une triste référence". Ainsi ce ne sont pas les Etats-Unis, l'oligarchie chilienne et Pinochet qui ont provoqué 50 ans de souffrances au peuple chilien mais "l'équivoque de la gauche" c'est-à-dire, soyons clairs, d'Allende et du Parti communiste chilien. Fallait oser.

Les gauchistes et les dogmatiques arment le prolétariat, écrasent l'armée chilienne et instaurent le DDP. Dans leurs cerveaux exaltés. Dans la réalité, plus prosaïque, comme le disait Allende à Régis Debray "Combien d'ouvriers faut-il pour arrêter un char?" Rappel : l'Unité Populaire a vu Salvador Allende devenir président du Chili avec 36% des voix contre 63% des voix aux droites (certes divisées 35% à la droite et 28% à la Démocratie-chrétienne).

Un rapport des forces que seuls les irresponsables et les phraseurs ignorent en décrétant, sans doute du haut de leur oeuvre révolutionnaire future, que la gauche chilienne fut "équivoque". Quand donc admettra-t-on que la gauche dans certaines circonstances historiques et rapports de forces afférents ne peut que subir une défaite ? Ce fut la cas au Chili en 1973 ou en Grèce en 1944-1949. Chercher des boucs-émissaires, pas assez ceci ou trop cela, espions, traîtres, déviationnistes etc... ne peut satisfaire que ceux dont la vacuité est la principale caractéristique.

 

Antoine Manessis.

 

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