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Un film de Costa-Gavras est toujours un événement. L'auteur de Z, de Missing, de L'Aveu ose le film politique. C'est suffisamment rare en France  pour être salué. De plus ses films provoquent  le débat. Entre amis, dans les familles... Adults in the Room ne manquera pas à la règle et c'est tant mieux.

Le journal grec Avghi, proche de Syriza, écrit : "La restriction asphyxiante de se concentrer sur le scénario de Varoufakis a conduit la mise en scène à une vision europhobe où la seule solution pour la Grèce aurait été la désobéissance, la rupture et le “Grexit” "

Et c'est bien cela qui est positif dans ce film. On comprend que les tsipristes n'apprécient pas. On comprendra que la gauche anti-UE, elle, soit aux anges. En effet ce film démontre combien la nature de classe de l'UE confirme l'analyse qu'en faisait Alain Madelin : "L'UE c'est l'assurance tout risques contre le socialisme ". Dès les résultats des élections de 2015 on voit Wolfgang Schaubel promettre l’apocalypse au peuple rebelle qui a voté pour la gauche radicale. Mais la critique d'Avghi est d'autant plus contradictoire que Yanis Varoufakis n'est pas partisan du Grexit. Ce qui, soit dit entre parenthèses, est très surprenant compte tenu de son propre témoignage. Cela étant l'acteur grec Christos Loulis qui joue le rôle de Varoufakis est absolument remarquable et contribue à crédibiliser ce qui se déroule sous nos yeux. Autre élément de la mise en scène qui donne cette note de vérité au film, le fait que Gavras ait choisi des acteurs de la même nationalité que celui des personnages dont ils tiennent le rôle.

Autre qualité du film, il est pédagogique. Tant  quant au fonctionnement des institutions européennes et internationales, la fameuse Troïka, BCE, FMI et UE, que sur la crise de la dette qui fut une excellente affaire pour les banques européennes.

Face à la brutalité, la violence et le cynisme des dirigeants de la Troïka, ce film pose aussi la question de l'amateurisme et de la fragilité des dirigeants de Syriza, Tsipras inclus. Seuls des hommes d'acier auraient pu résister aux chantages et aux pressions, à la corruption et aux menaces de cette caste raciste, arrogante et impitoyable qui dirige l'UE. La scène où les envoyés de la Troïka à Athènes se plaignent de n'avoir qu'un étage au Hilton à leur disposition illustre bien le rapport colonial que ces hauts-fonctionnaires entretiennent avec les Grecs y compris le ministre de l'économie. Le film montre aussi, sans ambiguïté, la domination totale de l'Allemagne sur l'Union Européenne et la lâcheté et la duplicité des dirigeants du gouvernement français (PS) couchés devant Merkel. On constate également que l'UE est non seulement anti-sociale mais anti-démocratique, considérant l'expression souveraine des peuples, en l’occurrence du peuple grec, avec un profond et absolu mépris. Soulignons aussi l'excellent Ulrich Tukur dans le rôle  Wolfgang Schäuble.

Bref, Avghi a bien vu le problème : en sortant de ce film on ne peut plus croire encore en " l'UE écologique, sociale et démocratique". Et on ne peut voir Tsipras que comme un individu incapable de respecter le mandat donné par le peuple (aux élections puis encore au Référendum de juillet 2015) qui avait dit NON au mémorandum de la Troïka à plus de 61 %. Tsipras lui l'a accepté et il a capitulé sans même avoir la dignité de quitter  sa fonction de chef du gouvernement. 

Quelle que soit l'intention de son auteur, il s'agit donc d'un film qui indique à la gauche que la sortie de l'UE et de l'euro est bien le chemin. Que celui-ci ne soit pas bordé de roses, qu'il soit difficile, qu'il oblige à un affrontement politique de haute intensité, où le peuple devra intervenir et soutenir ses choix, qui peut en douter ? Mais il n'y en a pas d'autre.

 

Antoine Manessis.

 

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