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                                                                            Le Sénat

 

Les élections sénatoriales ont eu lieu ce week-end dans l'indifférence générale.

Certes le mode de scrutin, ce sont les" grands électeurs" qui votent (les élus départementaux et municipaux), ne favorise pas l'attention des citoyens. 

L’article 24.4 de la Constitution précise que le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales de la République. Garant de la stabilité des institutions, le Sénat ne peut être dissous (contrairement à l’Assemblée). Les sénateurs examinent les projets de loi (et en proposent), contrôlent l’action du gouvernement, conduisent des missions d’information et des commissions d’enquête.

Cela étant le Sénat a une histoire.

Cette deuxième chambre fut une création de la constitution thermidorienne en 1795 dont le but est d'atténuer les pouvoirs de l'Assemblée nationale (les noms varient) plus sensible (même avant l'instauration du suffrage universel masculin, puis universel en 1945) aux "humeurs populaires". La République démocratique de Robespierre vient d'être renversée par Thermidor et la droite veut empêcher un retour de la "plèbe" d'où la deuxième chambre inspirée de la Chambre des Lords anglaise.

Sous Napoléon Ier le Sénat est à la main de l'Empereur, les sénateurs s'auto-désignent, pas d'élection même indirecte, le Sénat s'auto-recrute parmi les riches et les choyés du régime.

Avec le Restauration monarchiste le Sénat devient la Chambre des Pairs, équivalent des Lords anglais. Docile aux monarques.

Entre les révolutions de 1830 et de 1848, sous le règne de Louis-Philippe, la Chambre des Pairs devient un espace que le roi définit comme " éloigné des excès du pouvoir populaire et des abus du pouvoir royal". Il devient aussi beaucoup plus bourgeois, la pairie n'est plus héréditaire, mais les pairs de France sont toujours nommés en nombre illimité par le roi qui offre à la bourgeoisie une reconnaissance conforme à son importance sociale. 

Sous le Second Empire(1852-1870) le Sénat (qui retrouve son nom) est considéré comme le plus sûr soutien du -régime, l'armée occupe une bonne partie des sièges du nouveau Sénat. Ministres, hauts fonctionnaires et magistrats, membres de l'Institut sont également bien représentés. Phénomène plus nouveau, la finance et l'industrie ont acquis leurs lettres de noblesse parlementaire : le banquier Achille Fould, le comte d'Argout, gouverneur de la Banque de France, Mimerel, un industriel du Nord, siègent au Luxembourg. 

Le Sénat sous la IIIe République(1870-1940) est conçu pour faire contrepoids à une Chambre des députés élue au suffrage universel direct, le Sénat est élu par les députés, les conseillers généraux et les délégués des conseils municipaux (un par commune, quelle que soit sa population, soit quarante-deux mille électeurs pour toute la France). Ce mode d'élection doit en faire le représentant privilégié des petites communes rurales et, espèrent les conservateurs, un bastion de la réaction. C'est d'ailleurs ce qu'il sera, faisant obstacle au vote des femmes ou aux lois sociales (sous le Front Populaire). Cela s'achève en 1940 lorsque la majorité de la Chambre des députés et du Sénat votent les pleins pouvoirs au maréchal Philippe Pétain qui abolira la République remplacée par l'Etat français.

Sous la IVe République la Constitution de 1946 réduit le rôle du Sénat, comme le marque symboliquement le nom de Conseil de la République donné à la seconde chambre (1946-1958). Cependant elle reste un bastion conservateur.

Enfin sous l'actuelle Ve République le Sénat  et son rôle sont confirmés. Promulguée le 4 octobre 1958, la constitution de la Ve République confère au Sénat un rôle éminent dans les institutions. Le président du Sénat devient le deuxième personnage de l'État et assure l'intérim de la présidence de la République. Il demeure du fait même de son mode d'élection un bastion de droite même si en 2011 il eut, peu de temps, une majorité socialiste.

Cette histoire du Sénat prouve que cette seconde chambre a, par vocation et volonté politiqueun rôle anti-démocratique. Certes des commissions d'enquêtes peuvent contrarier l'Exécutif, cependant par son mode d'élection et donc sa composition, où la droite et les notables sont surreprésentés, le Sénat a joué toujours le rôle réactionnaire qu'on lui a fixé dès sa création et qu'il a eu durant toute son histoire et quelques soient les vicissitudes de celle-ci.

Aussi il devrait être à l'ordre du jour d'une réforme institutionnelle progressiste d'abolir le bicamérisme actuel. Une seule Assemblée qui est l'expression du suffrage universel devrait représenter le pouvoir législatif. Certes sa composition devra se conformer à donner une image juste et du peuple et des forces politiques. Mais ceci est un autre aspect du changement institutionnel.

En revanche la suppression du Sénat devrait être présent dans le programme de tous les partis de gauche. A notre connaissance il ne l'est que dans celui de la France Insoumise. Or quand on voit, outre son rôle durant toute notre histoire, toutes les magouilles dont les sénatoriales sont l'occasion (y compris à gauche) il est même de salubrité publique de supprimer cet institution érigée pour contrer la volonté populaire.

 

Antoine Manessis.

 

 

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