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                                                                        Eric Hobsbawm

Eric Hobsbawm est un des plus grands historiens sinon le plus grand historien de notre temps.

Eric Hobsbawm, né le  à Alexandrie et mort le  à Londres.  Une vingtaine de ses ouvrages ont été traduits en français, dont les plus importants sont sa tétralogie: L’ère des révolutions: 1789-1848; L’ère du capital: 1848-1875; L’ère des empires: 1875-1914 et L’âge des extrêmes. Histoire du court XXe siècle: 1914-1991. Cette extraordinaire synthèse brosse un tableau impressionnant par sa puissance, sa finesse, sa culture, de l'histoire contemporaine.

Son œuvre ne peut être détachée de son adhésion au Parti Communiste de Grande -Bretagne et au marxisme.  Il occupait déjà une place de premier plan dans l’historiographie internationale, mais la parution de L'âge des extrêmes  lui a permis de conquérir un public beaucoup plus vaste. "Aucune nouvelle interprétation du monde contemporain ne pourra échapper à une confrontation avec la sienne, désormais canonique. Ce constat révèle un paradoxe, car le XXe siècle s’est achevé dans un climat de restauration intellectuelle et politique, congédié par un vacarme médiatique qui annonçait le triomphe définitif de la société de marché et du libéralisme. Hobsbawm, en revanche, ne cachait pas ses sympathies pour le communisme, le grand perdant de la guerre froide, ni son attachement à une conception marxiste de l’histoire" comme l'écrit Enzo Traverso.  

Qualifié de stalinien et espionné par le MI5 pendant des décennies, le Guardian titrait à sa mort : "Eric Hobsbawm était-il un dangereux communiste ?" Pierre Nora et François Furet ont tenté d'interdire la publication en français de L'âge des extrêmes. En vain grâce au Monde Diplomatique et une maison d'édition belge. Bien entendu Hobsbawm était un marxiste critique et il eut de ce fait des démêlés  avec la direction alors sectaire du PC de Grande-Bretagne. Un débat a éclaté au sein du parti. Des historiens renommés tels que Thompson ont démissionné de désespoir du PCGB, Hobsbawm a réclamé le droit d'exprimer une critique interne. Une personnalité du parti l’a qualifié de "personnage dangereux". Les "libertés" qu’il demandait conduiraient à "l’anarchie du parti". Le parti a refusé de bouger. Mais l'histoire donna raison à Hobsbawm...

Ce qui fait la force d'Hobsbawm c'est qu'il tient les deux bouts de la chaîne : il est à la fois capable d'écrire de façon critique la réalité du socialisme réel  "La tragédie de la révolution d’Octobre est précisément de n’avoir pu produire qu’un socialisme autoritaire, implacable et brutal", et en même temps de  citer Oskar Lange qui confesse qu’il n’arrive pas à trouver une réponse à la question "Y avait-il une alternative à la précipitation brutale, aveugle et en fin de compte non préparée du Premier Plan Quinquennal ?". Hobsbawm explique que dans les conditions de l’URSS des années 1920 et 1930, aucune politique d’industrialisation et de modernisation n’aurait pu être menée sans violence ni coercition. 

 

 

Le marxisme d'Hobsbawm est d'une sensibilité historique fine et une profondeur théorique rare qui donne une cohérence, une structure et un sens à l'histoire. Car son rapport avec Marx est critique, ouvert, intelligent c'est-à-dire dialectique. On est loin des postures et des phrases creuses des historiens anticommunistes et médiocres, tel Furet, comme des dogmatiques momifiés cachant mal leur évanescence, leur absence de stratégie et d'organisation.       

Hobsbawm salua dans un article "Le grand Gramsci" l'apport singulier du militant italien, "probablement le penseur communiste le plus original produit dans l'Ouest du XXe siècle". Il su démasquer Tony Blair qu'il qualifia de "Thatcher en pantalon" ou la dissolution du PCI qui consistait, dit-il, à "jeter le bébé et garder l'eau sale du bain". Hobsbawm décrivait Gorbatchev comme une "figure tragique qui a détruit ce qu'il voulait réformer et a été à son tour détruit".   

Expliquant la crise des partis communistes il explique "Le gros problème de l'après-guerre pour tous les partis communistes c'est ce que devaient faire les mouvements révolutionnaires dans des situations de stabilisation non seulement temporaire, mais à long terme.C'est dans la découverte de cette stabilisation que se situe l'hétérodoxie".(in L'optimisme de la volonté)

Bref toute citoyenne, tout citoyen, qui s'intéresse à l'histoire devrait lire Eric Hobsbawm.

 

Antoine Manessis.

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