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                                               Manon Aubry avec les paysans en lutte

 

 

Après les "mouvements divers" au Salon de l'Agriculture que peut-on remarquer ?

D'abord l'offensive du RN en direction de ce qui subsiste du monde paysan. Une offensive qui semble d'ailleurs remporter un certain succès.

Cela n'est pas franchement étonnant. Le RN joue comme tous les fascismes historiques sur tous les tableaux à la fois. C'est un point commun avec la Macronie: une démagogie sans limites. 

Le capitalisme oeuvre à la liquidation de l'agriculture paysanne et à celle de la petit propriété depuis de longues années, des décennies. Il le fait  en tenant compte de l'alliance historique de la bourgeoisie et de la paysannerie conclue lors de la révolution française. Précisons que la paysannerie n'est pas plus homogène qu'une autre classe et que la Faucille, le communisme paysan, a existé aussi (lire le beau livre de Jean Vigreux La faucille après le marteau. Le communisme aux champs dans l'entre-deux-guerres).

Reste que le capital est parvenu à liquider une partie de la paysannerie au profit de l'industrie agro-business. Le patron de la FNSEA est paradigmatique de cette tendance.  Diplômé de l'European Business School de Paris, il a commencé sa carrière sur les marchés financiers, il est président d'Avril, l'un des plus grands groupes agroalimentaires français. 

L'inconvénient de cette concentration capitaliste est qu'elle laisse sur le carreau les paysans qui travaillent encore dans l'agriculture paysanne et d'autre part elle se heurte à un courant fort de la société pour une alimentation "non-industrielle", saine, locale et bio. 

Les considérations écologiques prennent de plus en plus de place, au moins dans les discours, et se télescopent avec le productivisme capitaliste.

Ces situations génèrent des contradictions. Elles sont exploitées par la FNSEA (aux origines pétainistes) qui reste le syndicat représentatif d'un monde paysan au tropisme de droite bien affirmé et qui détourne la colère de la fraction souffrante de la paysannerie contre les normes environnementales, la simplification administrative...évitant le fond du problème: l'imposition de la logique capitaliste dans l'agriculture.

Deux autres organisations sont entrées dans le mouvement actuel la Coordination rurale proche du RN et la Confédération paysanne plus proche de l'écologie de gauche. Sans battre en brèche la domination de la FNSEA.

Les violences qui ont marqué la visite d'Emmanuel Macron au Salon de l'Agriculture ont été initiées par le RN dans la perspective des élections européennes. En s'appuyant sur une colère légitime mais incapable de définir son véritable adversaire. De plus la FNSEA a hurlé à la provocation du fait d'une invitation malencontreuse au Soulèvement de la terre, il y a peu menacé de dissolution et traité d'éco-terroriste par le guignol de la place Beauvau. Macron qui  voulait embobiner les leaders du monde agricole avec un "grand débat" où sa logorrhée magique aurait réglé des questions qui dépassent sa très petit personne a fait un flop politique. Finalement annulée puis réduite à des combines avec la FNSEA le "petit débat" n'a évidemment rien réglé.

Passons sur les délires de ceux qui voient dans le mouvement récent du monde agricole l'alliance en action de la Faucille et du Marteau. Au point de fabriquer des faux pour l'illustrer... Le ridicule, fort heureusement, ne tue pas.

Ajoutons que faire de l'UE le bouc-émissaire des 7 plaies de l'Egypte n'est que mystification: le capitalisme n'a pas eu besoin de l'UE pour construire une agriculture capitaliste et tendanciellement liquider l'agriculture paysanne. Ce genre de diversion ne fait que renforcer le RN qui apparait "à la fois" comme la force anti-UE et pro-UE. De plus cela renforce le nationalisme dans la vision d'une alternative au néo-libéralisme.

En revanche avec la PAC et les négociations des accords de libre-échange, l'UE est au coeur de ce qui fait et de ce qui devrait se faire. L'UE, comme l'Etat national, n'est pas insensible aux rapports de forces. A la gauche donc, en France et en Europe, de faire des propositions ( https://francoisruffin.fr/agriculture-propositions/ ), les soumettre aux peuples qu'il faut convaincre, de façon à faire vivre une agriculture paysanne qui préserve la santé des agriculteurs et des consommateurs. Des mesures qui permettent aux paysans de vivre de leur travail. Des mesures de protection de l'environnement. Des mesures qui permettent aux classes populaires d'avoir accès à une nourriture de qualité.

L'élargissement de l'UE à l'Ukraine est souhaité par le NPA, la social-démocratie, les Verts, la Macronie... il faudrait peut-être s'interroger sur les conséquences d'une telle intégration dans le contexte de concurrence exacerbée, de guerre économique générale, d'absence de régulations contraignantes. Sur l'agriculture mais pas seulement. 

Mais pour tout cela il faut renforcer la gauche de gauche réellement existante.

 

Antoine Manessis

 

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