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Missak Manouchian (Ernest Pignon Ernest)

                                                             

 

 

"Vous n’avez réclamé ni la gloire ni les larmes                                             
Ni l'orgue ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servis simplement de vos armes
La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans"         

L'Affiche rouge 
- Aragon

 

 

Missak Manouchian au Panthéon. C'est officiel. NBH s'en félicite d'autant que certains militaient pour cela depuis fort longtemps.

Cependant cette panthéonisation d'un immigré étranger, militant et Résistant communiste par la droite française mérite notre attention. 

Emmanuel Macron, Carole Delga ou Laurent Wauquiez en avaient exprimé le souhait, et le président l'a décidé en vertu de la Constitution bonapartiste de la Ve République.

 

Nous leur disons clairement que cette décision ne vaut pas amnistie.

 

Remarquons qu'elle arrive 80 ans après la mort de Manouchian, combattant Franc-Tireur Partisan de la Main-d’œuvre immigrée  (FTP-MOI) et commissaire militaire des FTP-MOI parisiens. Arrêté par la police française, les Brigades spéciales, une police spécialisée dans la traque des communistes, "ennemis de l'intérieur". Torturé, il fut remis aux autorités allemandes avec vingt-deux de ses camarades. Tous furent condamnés à mort et assassinés par les nazis et ceux-ci couvrirent d’affiches rouges les murs de Paris. Ils y dénonçaient "La libération par l’armée du crime" et présentaient Manouchian comme le chef d’un groupe de "terroristes étrangers communistes".

Il a fallu donc 80 ans pour que "l'hommage de la nation" soit rendue à Manouchian et ses camarades. Pourquoi si longtemps ?

Parce que les partisans des FTP-MOI qui combattaient les armes à la main contre le fascisme étaient essentiellement des communistes ou des proches compagnons d'armes du PCF.

Parce que ceux qui combattaient au sein des FTP-MOI étaient des étrangers.

Parce que les droites (ou d'autres décorés de la "francisque") au pouvoir ont combattu les communistes. Les accablant de calomnies qui ne collaient pas à la vérité sur le combat des communistes dans la Résistance. Il fallait donc taire cette vérité.

Les communistes ont toujours combattu le fascisme, l'extrême-droite, la droite extrême, les héritiers de Pétain et de ses Brigades spéciales. Or les droites ont poursuivi cette politique de répression anticommuniste. Qu'on se souvienne du massacre de Charonne (1962) dont les neuf morts, victimes de la police de l'Etat gaulliste alors dirigée par un ancien de Vichy, étaient tous communistes. La même police française, dirigée par le même Maurice Papon, qui avait, un an auparavant, massacré des centaines d'Algériennes et d'Algériens à Paris. 

Les communistes ont combattu les guerres coloniales en Indochine, en Algérie. Ils se sont donc trouvés aux prises avec les droites, toutes colonialistes, menant des guerres absurdes et des massacres sans nom. Les communistes l'ont payé cher. Deux parmi d'autres: Maurice Audin (1957) assassiné par l'armée française ou Fernand Iveton (1957) guillotiné par l'Etat français. Le ministre de l'Intérieur de l'époque, François Mitterrand, donna un avis défavorable à la grâce qui fut refusée à Iveton par le président de la République René Coty (de droite et qui avait voté les pleins pouvoirs à Pétain en 1940).  

L'Etat français fasciste de Vichy, ses flics, ses juges, ses hauts fonctionnaires, nombre de ses politiciens sans même parler des milieux d'affaire, restèrent en place. Et poursuivirent leur combat contre le communisme.

Pour ce faire les communistes furent criminalisés. "Complices du Goulag", couverts du sang des "millions" de morts (certains réels et d'autres supposés) soviétiques ou chinois, "totalitaires" par nature, les communistes étaient voués aux gémonies. L'effondrement de l'URSS acheva le tableau. 

En quoi les FTP-MOI étaient-ils coupables des errements et des crimes du NKVD ? Qu'importe, les communistes n'avaient pas le droit au Panthéon parce qu'ils étaient les adversaires résolus des droites et du capital.

Aujourd'hui donc les droites, considérant que le communisme est mort, veulent se donner le beau rôle et se fabriquer une caution démocratique. C'est cela qu'il faut refuser. Clairement. Pas un seul merci à Macron, sa décision est à la fois juste verdict de l'histoire et basse manœuvre de son camp.

 

Pas d'union nationale autour de Manouchian.

 

Manouchian appartient aux siens, aux ouvriers, aux salariés, au peuple. Manouchian appartient à ceux qui hier encore manifestaient contre le recul de l'âge de la retraite à 64 ans. Pas à la Macronie et pas au capital. Manouchian appartient à sa France qui n'est pas celle de la droite. Sa France c'est celle chantée par Jean Ferrat. Celle où les étrangers sont nos sœurs et nos frères de classe. Celle qui vomit le racisme et la xénophobie du RN, des LR et de Darmanin. Celle qui sait que la police est au service des riches et cogne sur les pauvres. Celle de 36 à 68 chandelles.

Manouchian l'ouvrier apatride, poète, arménien, communiste est dans le Panthéon de "Ma France" depuis longtemps. Depuis 1934 date à la quelle il adhéra au parti communiste contre le fascisme. Son plus beau Panthéon reste le grand coeur de sa classe et du peuple. 

Que la bourgeoisie pense pouvoir se servir de Missak Manouchian pour pouvoir se donner le beau rôle, faire oublier sa sordide et criminelle histoire, disons-le tout de suite et avec détermination : ça ne passera pas. 

 

Laissons le dernier mot à Manouchian (extrait de sa dernière lettre à Mélinée son amie, sa camarade, son épouse) :

"Je m’étais engagé dans l’Armée de la Libération en soldat volontaire et je meurs à deux doigts de la Victoire et du but. Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter la douceur de la Liberté et de la Paix de demain. Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement. Au moment de mourir, je proclame que je n’ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu’il méritera comme châtiment et comme récompense. Le peuple allemand et tous les autres peuples vivront en paix et en fraternité après la guerre qui ne durera plus longtemps. Bonheur ! à tous ! "

 

 

Antoine Manessis

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