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Le crétinisme dogmatique vaut bien le crétinisme parlementaire.

En 2013 11% des salariés étaient syndiqués, en 2019 il n'étaient que 10%. De plus 60% des syndiqués ne participent pas à la vie de leur syndicat.

L'abstention aux élections professionnelles dans le privé est de 60% et dans le public de 55%.

La désaffiliation des organisations syndicales (et politiques d'ailleurs) est une tendance lourde que nous constatons depuis des années. Ce qui entraîne une faiblesse structurelle du champ syndical.

La classe ouvrière n'est plus en 2023 ce qu'elle était encore en 1970. Elle n'a pas disparu mais ses transformations dans le sens d'une fragmentation, d'une atomisation, d'une individualisation sont telles qu'elle changent profondément la donne syndicale (et politique).

Voilà la réalité rude et incontournable.

Que les dogmatiques veuillent refaire la CGT de Benoit Frachon démontre leur inadéquation avec leur temps et la réalité sociale. Ce ne sont pas les rodomontades des uns et l'aveuglement sectaire des autres qui changeront les choses. Cela ne fait qu'ajouter le ridicule à la division.   

Attaquer la nouvelle dirigeante de la CGT en déformant gravement ses propos est non seulement malhonnête, ce qui n'étonne pas de la part de ceux qui se réfèrent à un univers mental fait d'hérésies et d'excommunications, cela révèle plutôt leur impuissance. Il ne leur reste, pour justifier leur inexistence dans les luttes concrètes, que des postures identitaires et passéistes. Que la tricherie dans les mots et même dans des images ridiculement trafiquées...décidemment un passé qui ne passe pas.  

L'aile syndicaliste-révolutionnaire au moins, si elle n'ouvre pas de perspectives, est au moins sur le terrain et dans l'action. Contrairement aux vieillissants petits-bourgeois incapables de remettre en cause leur foi écroulée sous les décombres du mur de Berlin, agitant des mots creux sans prendre aucun risque, enfermés, révolutionnaires en peau de lapin, dans un légalisme peureux.

Même la journée d'action du 6 juin ne trouve pas grâce aux yeux des gauchistes trotskistes ou jdanoviens. Pensez-vous! Y'a qu'à "créer un rapport de forces dur par la grève reconductible". Dommage qu'au bout de 3 mois de lutte personne n'y ait songé...On se demande vraiment si ces gens sont sérieux ou s'ils ne sont là que pour passer le temps à déverser des mots, "Words, words, words..." comme disait Shakespeare.

Faut-il vraiment redire que l'union est un combat, tant dans le champ syndical que politique, et que ce combat se mène avec des partenaires qui sont différents de nous et avec qui nous avons des divergences? Ce B-A BA semble échapper aux sectaires de tout poil... La CFDT, pour ceux à qui cela aurait échappé, existe. La CFDT n'a pas la même tradition ni la même conception de la lutte syndicale que la CGT. Et alors? L'action unie avec la CFDT renforce-t-il ou non le mouvement social? Sur une base minimum direz-vous. Certes et qu'est-ce qui empêche ceux qui veulent aller plus loin de porter leurs propositions d'action devant les travailleuses et les travailleurs? Car en définitive ce n'est ni la CGT, ni la CFDT qui décident mais "les masses" comme on disait.

   

L'intersyndicale a en effet décidé d'appeler à une nouvelle journée d'action. La date de cette journée, la quatorzième, a été fixée au mardi 6 juin, deux jours avant l'examen de la proposition de loi à l'Assemblée nationale destinée à abroger la réforme. Ce qui est plutôt judicieux. On peut proclamer qu'il s'agit d'un "enterrement du mouvement" mais à défaut de proposer une alternative crédible et concrète, il y a bien un moment où la forme de la lutte change surtout quand la perspective de la grève reconductible et des manifs massives s'éloignent.

"Nous appelons unitairement nos organisations à aller rencontrer les députés partout pour les appeler à voter cette proposition de loi. Dans ce cadre, l'intersyndicale appelle à multiplier les initiatives avec notamment une nouvelle journée d'action commune, de grèves et manifestations le 6 juin prochain permettant à l'ensemble des salariés de se faire entendre des parlementaires."

Ce qu'on peut regretter ce n'est pas l'alignement des syndicats sur le calendrier parlementaire, c'est, au contraire, l'insuffisante liaison et complémentarité, le manque de coordination entre luttes syndicales et politiques. La charte d'Amiens n'est pas le Décalogue et l'indépendance syndicale n'interdit pas d'avoir une approche intelligente du rapport syndicalisme et politique.

 

Une fois encore, répétons-le, il y a des critiques à faire sur la manière dont le syndicalisme se construit et se vit. Mais les réponses sont à puiser dans la réalité c'es-à-dire dans les luttes telles qu'elles se mènent aujourd'hui et non dans un passé mythifié. Ce n'est pas une énième proposition de "manifestation nationale" qui va régler la désaffiliation syndicale, la professionnalisation des dirigeants syndicaux, les manifs-ballades, l'ouverture aux questions éminemment sociales que sont la place des femmes dans le syndicat, la lutte contre le sexisme et le racisme et les questions d'environnement qui deviennent centrales. Comme l'a dit Sophie Binet la CGT doit "être capable de porter au même niveau fin du monde et fins de mois".
Sans parler des questions stratégiques: quel syndicalisme pour notre temps? Et tactiques: comment travailler à l'unification syndicale ou encore quelle articulation avec les forces politiques progressistes afin que celles-ci s'engagent devant l'opinion à abroger immédiatement cette contre-réforme néo-libérale sur les retraites pour que l'alternance soit tendanciellement une alternative.

Voilà quelques unes des pistes de réflexion pour les militants syndicaux et ceux qui devraient vite les rejoindre. Sans attacher trop d'importance aux imprécateurs: parler pour ne rien dire, depuis un lieu qui n'existe pas, avec des forces inexistantes, non merci.

 

Antoine Manessis.

 

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