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https://www.contretemps.eu/die-linke-gauche-allemagne-crise-congres/

 

Le congrès du parti Die Linke (La Gauche) s’est tenu du 24 au 26 juin dernier à Erfurt (RFA).

Loren Balhorn, militant marxiste de ce parti, nous dresse un état des lieux de la gauche allemande qui à la fois interroge et inquiète. Dans un article très intéressant, dont le contenu montre que son auteur, pourtant acteur engagé, ne se raconte pas des histoires mais observe avec lucidité la place de son parti.

Interroge et inquiète pour la gauche allemande mais aussi pour la gauche en Europe, il suffit de penser à la Grande-Bretagne, l'Italie, l'Espagne, la Grèce, la Hongrie ou la Pologne. Et l'on pourrait en citer, hélas, bien d'autres.

Comme le dit Stathis Kouvélakis dans son introduction à l'article de Balhorn "l’absence de stratégie hégémonique et l’amorphie organisationnelle" qui  caractérise Die Linke est loin de ne concerner que la gauche allemande. Article publié dans la revue Contretemps.

Cela étant, et sans en tirer une quelconque vanité tant il reste à faire, on songera que la gauche française s'en sort relativement bien. Cela tient à la fois à la tradition historique et à l'intelligence politique et la ténacité courageuse de Mélenchon et de ses camarades.

Symboliquement la démission d'Oskar Lafontaine, le fondateur de Die Linke, fait peser la menace d’une crise terminale. Au congrès Sahra Wagenknecht et ses amis, l'aile "populiste de gauche" ont été largement battus par la majorité du parti, composée d’une alliance tactique entre l’aile "modérée" du parti (représentée par le nouveau co-président Martin Schirdewan) et le courant "mouvementisme" qui a pris de l’importance ces dernières années, représenté par la co-présidente Janine Wissler.

On ne peut pas dire que les mouvements de la gauche de gauche, porteurs de grands espoirs, aient tenu toutes leurs promesses: Syriza, Podemos, la gauche travailliste de Corbyn ou la gauche démocrate de Sanders, le Bloco de Esquerda au Portugal sans les confondre, tant leur histoire que leur situation sont différentes, n'y sont pas parvenus. Disons aussi pour être juste que les deux partis communistes encore existants en Europe, le KKE et le PCP, n'y parviennent pas davantage et semblent eux aussi pris dans une spirale les vouant à la marginalisation si ce n'est à la disparition. En France, ce n'est pas l'identitarisme de posture et l'opportuniste malsain du roussellisme à 2,3% qui permet de contredire le constat.

Pour nous ce marasme de la gauche, son impuissance, son incapacité à l'organisation et à l'action, sa capacité au contraire au morcellement est lié à deux facteurs centraux : l'atomisation et la précarisation du prolétariat et le défaite historique du soviétisme, du " socialisme réellement existant". Ces deux éléments combinés ont été mortifères.

Ils expliquent, au moins partiellement, l'éloignement de la gauche et des classes populaires.

"Le développement d’une compréhension théorique commune et d’une perspective stratégique n’ont pas été accomplies.../...Il s’avère qu’une sorte de centre stratégique – un rôle autrefois occupé par les partis de masse socialistes et plus tard communistes – joue un rôle vital pour rassembler les différents courants de protestation et d’opposition dans la société et les faire converger en une force capable de défier et finalement de s’emparer du pouvoir d’État."

Nous dit Balhorn.

Il cite, à contre-exemple à Die Linke, Parti du Travail de Belgique (PTB). "Fondé en tant que petit groupe maoïste dans le sillage de 1968, le PTB a entamé une transformation fondamentale de sa culture de parti et de ses perspectives stratégiques au début des années 2000, en se concentrant sur la base, l’organisation au niveau des quartiers et en mettant l’accent sur son opposition pratique, plutôt qu’idéologique, à la politique gouvernementale. Depuis lors, il est passé de moins de 1% aux élections de 2008 à près de 9% en 2019, et recueille actuellement plus de 20 % dans certains quartiers populaires tout en ayant multiplié par vingt le nombre de ses adhérents."

Die Linke est même menacé de scission "même si le résultat en serait deux formations croupion, dont aucune ne pourrait rassembler les votes nécessaires pour se maintenir au Parlement fédéral."

L’avenir du socialisme démocratique, en Allemagne et partout ailleurs, réside dans la construction d’un mouvement de masse de la classe travailleuse élargie. Des millions de travailleurs qui vivent avec des salaires de misère. Développer une nouvelle stratégie qui leur donne la priorité serait une première étape importante pour renouveler le parti.

Sur le front de la politique étrangère "Même si les plans du chancelier SPD Olaf Scholz, qui prévoit de dépenser 100 milliards d’euros de nouveaux armements, sont populaires en ce moment, une minorité importante voit la nouvelle politique étrangère agressive de l’Allemagne avec scepticisme. Sa taille augmentera inévitablement à mesure que le pays redeviendra une puissance militaire après « 80 ans de retenue », comme l’a dit l’autre jour le président du SPD. Pendant des générations, l’opposition à la guerre et à la militarisation a été un catalyseur important pour le renouvellement de la gauche allemande, et il y a peu de raisons de penser qu’elle ne pourrait pas l’être aussi cette fois-ci".

Avec l'optimisme de la volonté Loren Balhorn conclut: 

"Avec une extrême droite allemande en déroute et l’establishment politique unifié derrière un gouvernement de plus en plus impopulaire, les conditions objectives pour que Die Linke retrouve son rôle de voix des laissés-pour-compte et commence à se reconstruire ne sont pas mauvaises. Mais pour que cela se produise, le parti doit enfin se constituer en une formation socialiste unie, capable de parler d’une seule voix."

Une contribution intelligente et utile à la gauche en Allemagne mais que nous aurions grand tort de ne pas entendre, ici et maintenant.

NBH

(On peut relire nos articles sur Die Linke sur NBH du 28 septembre 2021 ou du 13 avril 2021)

https://www.contretemps.eu/die-linke-gauche-allemagne-crise-congres/

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