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                                                                                 Frantz Fanon

 

 

A l'heure où  la CIJ (Cour Internationale de Justice) des Nations Unies reconnaît "un risque génocidaire" à Gaza on peut, on doit se rappeler de la contribution de Frantz Fanon (1925-1961) au combat anticolonial et émancipateur. Fanon revient comme le retour du refoulé dans les lieux de circulation des idées en France, à la faveur du travail de l’antiracisme politique er de la pensée post-coloniale.

Le marxiste martiniquais a eu une réflexion originale sur la colonisation. Par exemple, sur le rôle de la paysannerie dans les processus révolutionnaires ou sur la violence. A propos de cette dernière il faut rappeler que c’est le colon qui impose au colonisé l’arme du combat, son niveau et sa nature.  Sur la paysannerie il écrit "les masses paysannes constituent les seules forces spontanément révolutionnaires, du pays colonisé.

Ses analyses de la bourgeoisie nationale ou encore celles des dérives des partis uniques sont visionnaires et collent à la réalité du système politique des nations indépendantes.

Son actualité vient du fait que la pensée de Fanon s’installe au coeur du problème colonial.  Mais pas seulement du point de vue des colonisés. En effet, Fanon met au jour jusqu’où l’emprise coloniale a atteint le colonisateur, la nation colonisatrice et à quel point celle-ci a dû intégrer le racisme à sa propre formation sociale. Comme aimait à le répéter Fanon, on ne colonise jamais impunément.

Ses analyses traient aussi de questions qui se posent encore à la gauche comme le rapport entre "le parti et les masses". Il donne sa conception qui n'est pas la vision léniniste: "Le parti doit être l’expression directe des masses. Le parti n’est pas une administration chargée de transmettre les ordres du gouvernement. Il est le porte-parole énergique et le défenseur incorruptible des masses. Pour parvenir à cette conception du parti, il faut avant toute chose se débarrasser de l’idée très occidentale, très bourgeoise, donc très méprisante, que les masses sont incapables de se diriger. L’expérience prouve en fait, que les masses comprennent les problèmes les plus compliqués".

Pour Fanon la libération nationale doit être accomplie par le peuple tout entier. Fanon n’avait pas plus de sympathie que Lénine vis-à-vis des actions "terroristes ou  gauchiste".

Il rappelle aussi "qu'il faut se battre avec ténacité pour que jamais le parti ne devienne un instrument docile entre les mains d’un leader. Aucun leader quelle que soit sa valeur ne peut se substituer à la volonté populaire." Remarque utile et incontournable.

Les analyses de Frantz Fanon, engagé dans la lutte de libération nationale algérienne, sont très certainement marquées par ces circonstances de ce combat. Fanon se trompait en croyant qu’en règle générale, "entre oppresseurs et opprimés tout se résout par la force", mais il avait raison de nous rappeler que les relations impériales et néo-impériales sont fondées sur la violence, sur des rapports de forces. Il avait raison d’insister sur le fait qu’au bout du compte, seule la volonté unie et déterminée du peuple offre la solution de base pour dépasser une telle violence.

On voit bien, dans la situation actuelle en Palestine, combien la violence coloniale tente d'éradiquer un peuple puisqu'il incapable d'accepter l'auto-détermination de ce peuple. C'est en cela que "le risque génocidaire" dénoncé par la CIJ se transforme sous nos yeux en une dynamique génocidaire.

La difficulté de traduire toutes ces considérations en stratégie politique est évidente mais elle peut être surmontée si on remplace la doctrine, des principes figés, valables en toutes circonstances et en tous lieux, par "l'analyse concrète de la situation concrète."

On peut à la fois enrichir nos réflexions par les apports de la pensée de Fanon sans craindre d'en critiquer certains aspect par trop marqués par leur temps, car ce qui est juste à tel moment et en tel lieu ne l'ait pas forcément demain et ailleurs.   

 

Antoine Manessis

 

Œuvres de Frantz Fanon :

  • Les Damnés de la Terre (1961)
  • Vers la révolution africaine (1964) 

     

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