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" Les euro-« gauches » établies qui ne cessent de servir la soupe empoisonnée de la « fascisation »."
Ainsi parlent les jdanoviens sans doute accablés par la canicule. Après avoir dénoncé "les euro-gouvernements", "l'euro-casse", les "euro-destructeurs", bref "l'euro-tout", imaginez vous que nos joyeux lurons s'en prennent à "l'euro-gauche".
Pour conclure leurs imprécations, que visent nos braves révolutionnaires ? La gauche. Toute. Sauf eux. Eux savent. Eux sont l'Alternative, "nécessitant de rompre totalement avec l’euro, l’UE, l’OTAN et le capitalisme et de construire le socialisme-communisme sous l’impulsion d’un véritable Parti communiste" (sic).
Qui peut tenir un tel discours en 2023 ? Qui, surtout, peut y croire ? A qui s'adresse-t-il ? Comment, en étant une centaine voire deux cents (soyons aimable) peuvent ils penser ce qu'ils disent ? Faire abstraction à ce point de la réalité, la nier ainsi, est tout de même consternant.
Ecarter de son analyse ce que pensent et expriment politiquement, socialement, culturellement, les femmes et les hommes de notre pays est-il sérieux ? Penser la masse critique, penser les rapports de forces, penser l'idéologie dominante, penser la politique quoi, est-ce au-delà de leurs possibilités ?
Ces grands stratèges prolétariens autoproclamés sont-ils trop aliénés par leur foi pour refuser de regarder la réalité un tant soit peu en face ?
Eux qui annoncent la disparition du français - en quel honneur ? - ne semblent ne pas se rendre compte qu'ils parlent une langue morte que plus personne ne comprend ni n'entend.
Dire une chose juste en soi et pour l'éternité ça n'existe pas. Une chose est juste si elle peut se transformer en force matérielle. Et pour cela il faut des conditions.
Quand Lénine dit "la paix, la terre, le pain", il se fait engueuler par des dogmatiques de son camp : "Quoi ! La terre à ceux qui la travaillent ? Mais ce n'est pas le socialisme !". Et ce genre de choses ne s'est pas produit une fois mais plusieurs fois. Quand Antonio Gramsci écrit que la révolution de Lénine est une "révolution contre le capital" (de Marx) il signifie que la révolution russe n'est pas conforme à la lecture canonique que faisait la IIe Internationale de Marx. Kautsky, qui en était le pape, n'était pas seulement un "renégat" (comme l'appelait Lénine) il était aussi l'exécuteur testamentaire d'Engels...
Citons encore Lénine conseillant une nouvelle orientation au pouvoir des Soviets: "une façon nouvelle de poser des problèmes nouveaux." Voilà sa réponse aux dogmatiques.
Après si sans aucune prise sur le réel, sans tenir compte ni des conditions objectives et subjectives, on veut, comme Miss France, dire "qu'on est pour paix et contre la guerre" ou "pour le socialisme-communisme" libre à nous. Mais le résultat ne sera probablement pas à la hauteur des espoirs. Les jdanovistes espagnols réalisent des scores lilliputiens aux élections genre 0,06% (bref, n'ont voté pour eux que la famille et quelques potes éméchés par la sangria). Et les autres jdanoviens, comme les nôtres, ne peuvent même pas se présenter.
Le PTB (Parti du travail de Belgique) tant qu'il fut "pur et dur" ( comprendre sectaire et dogmatique) est resté un groupuscule. Il n'est devenu un parti qui compte en Belgique que lorsqu'il a changé la camisole contre un T-shirt. Et il est désormais proche de la France insoumise. Le Président du PTB Raoul Hedebouw et Jean-Luc Mélenchon étaient invités au Sommet des peuples à Bruxelles aux côtés des présidents de Cuba, de Colombie, de Bolivie.
Voilà comment on fait, un peu, avancer les choses. Comment on est reconnu par des fractions des travailleurs et des peuples comme des forces émancipatrices.
Allez, encore un petit dernier Lénine pour la route : "La première tâche de tout parti de l'avenir, c'est de convaincre la majorité du peuple de la justesse de son programme et de sa tactique." Pas mal non ?
Cela ne se fait pas en traitant la gauche réellement existante, la gauche qui subie des campagnes violentes et infamantes des droites et des néofascistes, la gauche de gauche (la FI) qui a la confiance de 22% des citoyennes et citoyens, "d'euro-gauche qui sert la fascisation". Ce n'est ni vrai, ni honnête, ni intelligent.
Parfois certains feraient mieux de se taire. Nous pensons à Macron bien sûr.
Antoine Manessis