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                                           Timbre biélorusse à l'effigie d' Alexandre Loukachenko 

 

 

Alexandre Loukachenko est le président de la Biélorussie, une ex-république soviétique et cela depuis 1994.

Il souhaite voir son mandat renouvelé pour une sixième fois en août. Ce qui peut advenir d'autant que son adversaire principal est un homme d'affaire Viktor Babaryko, ancien banquier d’une filiale du géant russe Gazprom. Ce qui n'est pas exactement une garantie d'incorruptibilité. Le président sortant l’accuse de vouloir  "privatiser" le pays et insinue qu’il est financé par Moscou. Cela dit  la Russie avec les ventes d’hydrocarbures à bas prix et l’achat des exportations des produits biélorusses non compétitifs, assure la survie économique de la Biélorussie. Sergueï Tikhanovski est tourné vers l’Occident. Son influence est surtout forte au sein de la jeunesse petite et moyenne bourgeoise urbaine qui juge archaïque le fonctionnement de la Biélorussie. Ceux-là  sont pour l’Union européenne.

Les femmes et/ou collaboratrices d'opposants  ont décidé de s'unir et de candidater l'une d'elle, Svetlana Tikhanovskaïa, épouse du prétendant Made in USA. Cela fait un "événement" dont parle France2 et les médias bourgeois mais qui n'a guère d'écho auprès du peuple Biélorusse. En revanche, toute aussi désolante que cette clownerie, est la réaction de Loukachenko qui a estimé que "si une femme veut être candidate, on l’enverra d’abord dans une unité militaire […] pour qu’elle soit formée et sache faire la différence entre un transport de troupes et un char".

Par ailleurs Loukachenko a dénoncé les manœuvres de déstabilisation parallèles des Occidentaux et des Russes contre son gouvernement. Ce qui n'est pas faux mais ne suffit pas à dessiner un avenir.

Les Biélorusses s’inquiètent du décalage croissant entre le discours sur le bien-être social et la réalité. Les licenciements se multiplient, en effet, dans un pays frappé de plein fouet par le ralentissement économique. Du fait de la baisse tendancielle du niveau de vie des Biélorusses, le régime de Loukachenko est considéré comme moins protecteur. Les salaires sont très faibles, mais également le prix des loyers, des transports ou  de la santé. L’économie biélorusse combine certaines tares et certains avantages du système soviétique mais le système capitaliste ronge les rapports sociaux de la stagnation-sécurité de Loukachenko.

A l'international Loukachenko tente de garder une autonomie face aux Russes et aux Occidentaux, jouant les uns contre les autres. Et dans le pays il a su conserver des acquis sociaux qui certes s’étiolent mais qui lui rallient une majorité de ses concitoyens *. Nous devons noter que malgré les campagnes régulières contre Loukachenko en Occident et particulièrement en France, les manifs des opposants en Biélorussie restent très faibles. En 2010 Le Figaro de décrivait comme "un dictateur aux abois" et en 2012 pour Le Monde il était "le paria de l'Europe". Heureusement pour les journalistes de ces brillantes analyses, le ridicule ne tue pas.

Reste que ce régime résiduel et à bien des égards caricatural ne peut sortir du formol qu'à son désavantage. Aucune perspective d'avenir réjouissante pour la Biélorussie et son peuple coincés entre le capitalisme russe et celui de l'Ouest. La construction d'une alternative progressiste, là-bas comme en beaucoup de pays, semble un ordre du jour bien lointain. En attendant le peuple biélorusse apportera sans doute une majorité à Loukachenko comme un moindre mal comparé au sort des Russes, Ukrainiens ou Polonais.

Cela dit entendre ou lire des progressistes s'extasier devant le loukachenkisme en dit long sur notre propre situation...

 

Antoine Manessis.

 

* Lire à ce propos l'excellent article de Loïc Ramirez  "Droit au travail en Biélorussie" Le Monde Diplomatique Janvier 2020 p.10

 

 

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