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Joseph Biden et Joseph Staline même combat ? 

A en croire la rumeur médiatique la gauche, très à gauche, occupe la Maison Blanche.

"Le ruissellement ça n'a jamais marché" proclame le nouveau Roosevelt. Et même à gauche on s'extasie. Au Figaro on s'inquiète. Macron passe pour un mini-Trump. La Biden-mania se répand, virale.

Que se passe-t-il donc aux États-Unis ?

Des plans de relance et d'investissement gigantesques sont mis en place: respectivement 1900 milliards et 2300 milliards.126 milliards pour les écoles maternelles et les lycées. 240 milliards pour la santé des plus pauvres. Diviser par deux la pauvreté des enfants grâce à un financement payé à 75% par le 1% des plus riches. Biden double la taxe sur les plus-values. En 100 jour, 100 millions d'étasuniens ont été vaccinés. Des mesures progressistes sont prises sur l'immigration, les Accords de Paris sur le climat, la protection des personnes transgenre et les E-U retournent à l'OMS en promettant de diminuer par deux ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030.  350 milliards sont alloués aux collectivités locales. La dette étudiante est annulée pour 50.000 dollars et Biden envisage une modification de la Cour Suprême visant à la démocratiser. Il reconnaît le génocide arménien. Il augmente le SMIC à 15$ de l'heure au lieu de 11,8. Et il soutient la création de syndicats chez Amazone.

Bref AOC, Alexandria Ocasio-Cortez, une des leaders de la gauche étasunienne, déclare "Biden va bien au-delà des attentes de l'aille progressiste" et Trump dénonce "un Biden d'ultra-gauche". La hausse des dépenses publiques tant honnies par le néolibéralisme n'effraie pas Joe Biden. La presse économique néolibérale s'étouffe de rage. 

Quel est le sens de tout cela ?

Deux axes :

1) ne pas croire que l'Exécutif étasunien est progressiste, social

2) ne pas négliger les acquis positifs de la politique de Biden pour les États-unien.ne.s. 

Le grand capital étasunien et son personnel politique, après l'épisode Trump qui était la caricature de la politique suivie par les États-Unis depuis Reagan, y compris sous Obama, ont constaté les tensions sociales grandissantes au sein des classes populaires.

Celles-ci s'expriment à gauche avec la confirmation d'une gauche plus radicale et osant se définir comme socialiste ce qui n'est pas rien aux Etats-Unis après deux siècles de diabolisation, de chasses aux sorcières et d'une répression sauvage et souvent meurtrière (syndicalistes, anarchistes, communistes, Black Panthers etc). Et l'importance et la mobilisation de mouvements comme Black Live Matter (que quelques débiles interprétèrent comme manipulé par Soros...).

Aussi à droite comme l'épisode de l'occupation du Capitole l'a montré de façon spectaculaire et, plus sérieusement, le vote Trump d'une fraction des couches populaires. 

Compte tenu de l'omniprésence de la violence et des armes dans la société étasunienne, dans son histoire, l'explosion sociale, le choc intercommunautaire, la forme que prend l'intervention policière - police de fait privatisée - ou celle de la Garde Nationale, peuvent présenter des aspects très vite chaotiques et dramatiques. L'incapacité à assurer à la communauté afro-américaine une situation supportable montre les limites du capitalisme étasunien à résoudre certaines contradictions sociales pourtant très visibles et qui pourrissent la société étasunienne avant et depuis l'abolition de l'esclavage.

Les classes dirigeantes ont donc pris conscience du danger d'un chaos qui serait mauvais pour les affaires. On sait que le capitalisme ne lâche quelque chose en direction des classes populaires que sous la contrainte. Soit d'un rapport de forces favorable au travail, soit parce qu'elles considèrent qu'objectivement la situation est porteuse d'explosions incontrôlables.

De plus la stabilité des États-Unis et le consentement des masses est indispensable pour tendre à une hégémonie mondiale mise à mal pas les concurrents comme la Chine au premier chef mais aussi les autres pôles tels la Russie, le Brésil, l'Allemagne, l'Inde etc Bref le monde multipolaire exige une plus grande "harmonie" intérieure (comme dit Xi Jinping). Que cela soit antinomique avec les contradictions du capitalisme n'empêche pas que "les fondés de pouvoir du capital" essayent de rendre les choses gérables pour les intérêts qu'ils défendent.

Si la légitimité et la compétitivité impliquent un retour ou une dose de keynésianisme, une sourdine au néolibéralisme, les classes dirigeantes le feront. Ce qui compte c'est qu'ils gardent la main "à tout prix". La guerre (générale) n'étant pas une option le choix réside dans des concessions ou le fascisme. 

Or les concessions de Biden ne sont pas aussi radicales que le croit le Figaro ou le Financial times. Il s'agit plutôt de rattraper le retard pris par les États-Unis après 40 ans de néolibéralisme déchaîné. La "priorité à l'emploi" proclamée par Joe Biden par exemple est faisable dans la mesure où l'emploi n'est pas protégé, où le système social étasunien dans son ensemble est minimum.

Biden n'est donc pas un diable socialiste. Il est moins "progressiste" qu'il n'y paraît. Deux exemples en reprenant ceux que nous citions plus haut : en doublant les taxes sur les plus values Biden revient au niveau qu'elles avaient en 2012...Quant à l'emploi, oui il veut en créer, mais sans droits sociaux. Et on rappelle que l'objectif sous-jacent à cette inflexion a pour but la domination de l'impérialisme étasunien. Cela dit, soyons clairs, tout est bon à prendre et servons nous de Biden contre qui vous savez.

En guise de conclusion

En plein New Deal, Roosevelt recevant des syndicalistes avait écouté leurs revendications. Puis il leur dit qu'il n'y accéderait pas. Mais il leur précisa que s'ils organisaient une grande grève il serait heureux d'être contraint de lâcher. A bon entendeur...

 

Antoine Manessis.

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