Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

La situation politique britannique est porteuse de riches enseignements quelque soit la manière dont se concluera cette période ouverte par la victoire du Brexit lors du référendum de 2016.

Constatons que les forces internationales et internes à la Grande-Bretagne, qui sont hostiles au Brexit, mènent une campagne d'une ampleur gigantesque et souvent grotesque. Les Britanniques sont menacés par la famine et la peste en cas de Brexit : plus de nourriture et plus de médicaments. Rappelons que la parfaite organisation du marché libre en France n'empêche pas des pénuries de médicaments, parfois dramatiques.... N'évoquons même pas la catastrophe économique, le chômage de masse etc, bref le retour à l'âge de pierre. Au delà de ces propos quelque peu...excessifs, l'adage "calomniez, il en restera toujours quelque chose" semble animer les promoteurs et les portes-voix de cette déferlante propagandiste.

Notons que soudainement le Parlement britannique est paré de toutes les vertus démocratiques. Il est vrai qu'il a fallu attendre 1918 pour que le suffrage universel masculin soit adopté et encore avec des dispositions qui tentaient de maintenir des aspects censitaires au vote. Il est aussi vrai que par sa compositions sociale le Parlement britannique est l'un des plus oligarchiques (25% des députés sortent d'Oxford et de Cambridge, 30% des Collèges privés, faute de statistiques par profession c'est un marqueur de classe ). Il est vrai que, quand l'assemblée censée représenter le peuple ne les représente pas, il est assez classique que les "représentants" aient le dernier mot. Les Françaises et les Français en savent quelque chose, puisque ce qu'ils ont refusé à 55% en 2005, lors d'un référendum, a été adopté par les parlementaires UMP et PS en 2008. Le système électoral (le scrutin uninominal à un tour) accentue ce caractère peu démocratique du parlementarisme britannique.

En ce qui concerne le Brexit le vote de classe ne fait aucun doute, ce sont les classes populaires qui ont voté Leave. C'est ce qui complique le positionnement du Parti Travailliste. Ses électeurs ont voté Leave et ses députés et une partie de l'appareil ont voté Remain. Ce qui explique que Corbyn tente de ne pas sortir de l’ambiguïté avec une posture floue : il souhaite des élections, un accord sur le Brexit avec l'UE, puis un référendum sur le Brexit tout en "restant neutre". Entre deux chaises difficile d'éviter la chute : selon les sondages seulement 25% des Britanniques comprennent ce discours et voteraient pour les travaillistes. D'autant que, toujours selon les sondages, deux tiers des Britanniques veulent respecter le vote souverain du peuple en 2016. Il est vrai que la menace d'un éclatement du Labour est réelle. Mais comment l'éviter ? La pression de l'aile droite travailliste et des couches moyennes supérieures des villes pèse donc sur Corbyn. Cela fut visible au congrès de Brighton. Trois motions étaient proposées aux délégués du congrès, celle de la direction du Labour (Corbyn), une autre  pour un nouveau référendum et une troisième pour le Remain. Si Corbyn est sorti vainqueur, il reste fragile.

D'autant que Boris Johnson, s'il a reçu de rudes coups comme le désaveu que lui a infligé la Cour suprême britannique, garde des atouts en main. En particulier il tentera de se faire le représentant de la majorité du peuple britannique qui a voté pour le Brexit tout en cherchant un accord avec l'UE. Sur sa droite Nigel Farage se fera le porte drapeau d'une sortie sans accord. Avec une forte abstention celui-ci aussi est une vraie menace. Cela étant la division qui frappe le Labour n'épargne pas le Parti conservateur, lui-même reflet des divisions du grand capital britannique. L'axe Trump/Johnson et l'annonce par le président étasunien "d'un très grand accord commercial" entre les deux pays peut certes aider Johnson mais reste hypothétique tant les contradictions inter-impérialistes sont réelles sans être insurmontables comme les accords de libre-échange (CETA, TAFTA etc) le montrent.

Les Britanniques sont donc confrontés à une situation très complexe, pleine de contradictions explosives, un pays très divisé, un peuple qui ne verrait pas sa décision souveraine violée sans réagir dans une conjoncture sociale particulièrement dégradée : quatre millions d'enfant vivent sous le seuil de pauvreté. Situation qui est le résultat des politiques thachérienne, blairiste et tory, violemment anti-sociales et anti-populaires. Aux forces de progrès de démontrer que la sortie de l'UE par la porte de gauche ne correspond en rien aux projets des ultra-libéraux comme Boris Johnson. Expliquer sans relâche qu'il ya un antagonisme total entre une politique de progrès social et les lois d’airain de l'UE. Mener une réindustrialisation qui combinerait la croissance économique et la protection de l’environnement , des nationalisations, en particulier des banques et des monopoles, le développement de services publics de la santé, de l'éducation, des transports, implique le Brexit de gauche.

Comme nous le disions dans notre article précédent : Ni Boris, ni UE !

Antoine Manessis.

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :