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18 mars 1871 est la date retenue pour la naissance de la Commune de Paris, le soulèvement du peuple de la capitale contre la trahison du gouvernement d'Adolphe Thiers, sa tentative de désarmer les Parisien-nes et d'arrêter les militants révolutionnaires. Après bien des péripéties le Comite Central de la Commune s'installe à l'hôtel de ville et la rupture est consommée avec le gouvernement. Hélas, la Commune ne profite pas de sa supériorité provisoire et ne marche pas sur Versailles où s'est réfugié Thiers et sa clique.

On connait le suite, l'éphémère gouvernement populaire, ses fulgurances et ses faiblesses, et enfin son écrasement durant la terrible "semaine sanglante" par le pouvoir bourgeois. 

Karl Marx, contemporain des événements révolutionnaires, saluera les ouvriers parisiens "s'élançant à l'assaut du ciel".

Mais au-delà de la mythologie il y a la diversité et la modernité de la Commune. Ses dimensions multiples, ces héritages divers. 

Dans la moment historique que nous traversons, la démocratie authentiquement populaire que tentait de mettre en place la Commune est déjà l'esquisse d'une réponse aux problèmes que pose la démocratie représentative quand elle ne représente pas le peuple mais, au contraire, exclu, de mille façons, les classes populaires.

L'actualité de ce qui se produit à l'Assemblée Nationale et au Sénat sur la réforme des retraites nous confirme le caractère objectivement censitaire que conserve la démocratie représentative quand elle ne représente pas. La "démocratie fédérée", "le peuple se gouvernant lui-même" des Communards sont des pistes pour dépasser la contradiction. Nous n'avons pas encore réglé la question. Et l'on voit un-e Citoyen-ne sur deux ne pas participer ni se reconnaître dans les élections et leurs résultats. 

Il faut dire qu'en 1945 la classe ouvrière est bien présente à l’Assemblée Nationale. Au total, 65 ouvriers parmi 522 députés. Ils étaient 22 députés en 1981 et 0% d’ouvriers à l’Assemblée nationale en 2017 alors qu’ils représentent 20% des Français. En revanche, 76% de cadres et de professions intellectuelles alors qu’ils représentent 17,1% de la population. Vous avez dit représentative?

La dimension profondément démocratique, l'approfondissement de la démocratie dans tous les domaines, sont des caractéristiques de la Commune de Paris. Et soit dit en passant, Fredrich Engels à qui l'on demandait ce qu'était le concept de dictature du prolétariat répondait en 1891: "Regardez la Commune de Paris. C'était la dictature du prolétariat." Ce qui veut dire que la version bolchevique de la DDP (parti unique, Tchéka, etc) n'est pas un modèle universel et intemporel, mais la réponse à une contexte historique très particulier.

Comme il faudrait expliquer que la démocratie c'est la dictature, même du prolétariat, mieux vaut laisser ce débat et ce vocabulaire dans les livres d'histoire. Expliquons donc plutôt que le combat des forces populaires c'est toujours plus de démocratie, toujours plus de pouvoir du, par et pour le peuple.

Comme il faut expliquer que la violence des forts, des dominants, des possédants est toujours plus violente que la légitime défense des classes populaires. Fermer une école, un hôpital, une entreprise est plus violent que cramer trois poubelles ou déchirer une chemise. Ne nous laissons pas terroriser par le discours médiatique, combattons-le offensivement et non défensivement. Les violents ce sont ceux qui bafouent la démocratie (la volonté du peuple souverain) et non ceux qui combattent contre l'iniquité et la violence sociale de la bourgeoisie.

La Commune de Paris a révélé le vrai visage, hideux et sanglant, de la bourgeoisie quand elle est menacée par la démocratie sociale, par la République sociale.  Comme les classes dirigeantes de tous les pays et de tous les temps, elles tuent, elles massacrent, elles génocident  pour préserver leurs privilèges et leur domination. Mais finalement les Bastilles tombent. Et, parfois, quelques têtes aussi. Hier dans la rue nous pouvions entendre "Louis XVI, Louis XVI, on l'a décapité. Macron, Macron, on peut recommencer". Slogan symbolique, évidemment, personne ne veut raccourcir Macron. Peut-être son mandat éventuellement. Mais aussi slogan, venue du fond des siècles, pour rappeler que l'action des dominants peut, à un moment donné, rencontrer la réaction des dominés. 

Malgré la semaine sanglante, la chanson dit "la Commune n'est pas morte".  Avec les 20.000 ou 30.000 hommes, femmes et même enfants massacrés par Thiers, Vinoy, Gallifet sous les insultes de presque tous les intellectuels et journaux de l'époque, rien n'y fit. La Commune vit. Parce qu'elle exprime un peuple et ses aspirations multiples. A Paris, mais aussi en province, durant les 72 jours du printemps 1871, mais aussi avant et après, au Comité central de la Garde nationale et dans les écoles, au travail et sur les barricades, internationaliste, tout en reposant aussi sur la défense patriotique contre la Prusse, etc. Multiples aussi sont les réalisations et les projets de la Commune, beaucoup inaboutis pour "cause de massacre", qui raisonnent encore dans nos têtes et nos cœurs.

Et surtout sans doute parce que son combat se perpétue dans chaque combat social pour améliorer la vie de ceux qui vivent de leur travail. En 1936, dans les défilés du Front populaire, de vieux Communards marchaient en tête, incarnant la permanence du combat émancipateur.

Ce combat connait un moment particulièrement intense dans nos rues, sur les lieux de travail, sur les places, dans les écoles,  pour défendre la retraite à 60 ans et contre le recul de l'âge de départ à 64 ans. Recul social gravissime qui entraînera automatiquement la destruction du système par répartition au profit des fonds de pensions, de la capitalisation. Ce qui est d'ailleurs le véritable objectif des "fondés de pouvoir du capital" provisoirement aux commandes de l'Etat.

En ce 18 mars ayons une pensée pour Eugène Varlin, Louise Michel et Jules Vallès, pour ces miliers de femmes et d'hommes qui ont fait la Commune.

La Commune dont la lumière, comme une étoile lointaine, nous éclaire en ce temps de lutte.

 

Antoine Manessis.

 

 

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