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Ne laissons pas la bourgeoisie et ses appareils idéologiques étouffer la campagne électorale.

L'instrumentalisation de l'intervention militaire russe en Ukraine avait commencé avant même que Poutine ne lance ses troupes vers Kiev. Diabolisation de l'adversaire. Escamotage de l'histoire. Négation de la politique de l'OTAN, c'est-à-dire des États-Unis et de ses vassaux contre la Russie.

La Russie en cédant au piège de l'agression a crédibilisé la campagne idéologique de l'impérialisme étasunien. Comme la propagande bourgeoise en 1914 a trompé d'honnêtes républicains qui ont cru que 1914 répétait 1792, qui ont cru que la République était menacée par les Empires centraux, la propagande actuelle parvient à cacher la responsabilité première des États-Unis et de l'OTAN dans la crise ukrainienne.

L'impérialisme occidental a tout fait depuis 30 ans, après l'effondrement de l'Union Soviétique,  pour détruire la Russie en tant que concurrente et rivale potentielle. Entre autres en satellisant les pays de l'ancien bloc socialiste en les intégrant dans l'OTAN. Mais la Russie est parvenue à se relever et elle est parvenue à s'affirmer comme puissance mondiale en intervenant sur plusieurs fronts, en particulier la Syrie.

Ces interventions avaient un double caractère: dirigé objectivement contre l'impérialisme étasunien quasi hégémonique d'une part et renforçant l'impérialisme russe d'autre part. La tension n'a donc cessé de monter entre les deux puissances même si les États-Unis ont cru longtemps que la Russie n'était qu'une puissance régionale pouvant être méprisée. C'est la raison pour laquelle les Étasuniens ont poursuivi leur politique agressive d'expansion vers l'Est ce que la Russie ne pouvait interpréter que comme une menace et une humiliation. Le choc dès lors devenait inévitable entre des pays dont les classes dirigeantes ont, par nature de classe, une dimension belliciste comme Jaurès et Lénine l'avaient parfaitement analysé. Comme l'histoire l'a terriblement confirmé en 1914 et en 1939. Le capitalisme engendre la guerre pour le partage des richesses, des marchés, des matières premières etc. Les armes de destruction massives et de destruction mutuelle nous ont jusqu'ici protégés d'une guerre générale. Mais les guerres où les puissances capitalistes, d'envergures variables, qui s'affrontent depuis 30 ans ne manquent pas.

Un trouble particulier frappe l'opinion, ou une partie d'entre elle, du fait qu'avec l'Ukraine l'affrontement se rapproche des centres impérialistes européens. Comme avant les deux dernières guerres mondiales, tant que les génocides, les déportations, les massacres de masses, le travail forcé ne touchaient que les pays périphériques, le tiers-monde, les peuples des pays capitalistes dominants ne prenaient pas conscience de ce qui se passait. Touchés directement lors des guerre mondiales, les peuples européens ont développé une sensibilité à ces événements qui s'est exprimée avec plus de forces conjointement avec le mouvement de libération nationale. Mais avec des limites. Limites qui suscitent une surréaction des peuples des métropoles impérialistes à des événements comme ceux d'Ukraine ou des attentats terroristes qui les frappent.

La bourgeoisie connait très bien ces mécanismes politiques et anthropologiques. Elle les utilise à son profit. Ainsi une campagne électorale est l'occasion pour les forces de gauche, progressistes de présenter des projets alternatifs. Parfois même anti-capitalistes. Face à la crise organique qui frappe les pays capitalistes, ces périodes de débat démocratique ne sont pas appréciées par les classes dirigeantes.

En 2022, et les quelques années qui précèdent,  on peut dire que la bourgeoisie s'appuie sur deux événements pour saboter au maximum le moment démocratique: la pandémie bien sûr et depuis quelques semaines la crise ukrainienne. Ces deux circonstances étouffent le débat et poussent, accompagnées par un discours idéologique très fort, à "l'union sacrée". Et donc à l'effacement de la conflictualité objective de la situation sociale, politique tant au niveau national qu'international. La fixation sur un "ennemi" diabolisé, un pilonnage médiatique adéquat, l'absence d'analyse historique qui disparait sous des sentiments de peur et/ou d'indignation paralyse l'esprit critique parfois chez les meilleurs. Fleurissent alors les fleurs aux fusils et les drapeaux ukrainiens un peu partout. C'est le règne de l'amalgame et de la simplification: qui n'est pas avec nous est contre nous avait dit W. Bush au lendemain du 11 septembre 2001, événement du même type que celui que nous vivons actuellement et qui met en berne l'intelligence, la compréhension d'une situation dans sa complexité et ses contradictions. 

Cela ne dure qu'un temps car la réalité reprend le dessus et s'impose mais à quelques semaines d'une élection majeure dans notre pays, cette ambiance peut être fatale pour la démocratie et son expression libre. Comptons sur Macron pour endosser le costume de protecteur de la nation (obligatoirement) unie face à la menace de guerre (réelle ou pas peu lui importe). Après avoir déclaré "nous sommes en guerre" contre le virus, nous aurons droit au nous risquons d'être en guerre contre les méchants, donc union sacrée, taisons nos différences qui ne sont que babioles sans importance face à l'Armageddon qui vient. 

Alors la gauche de transformation et de rupture sera confrontée à un dilemme: braver l'union sacrée ou jouer le jeu (plus ou moins). Or les deux solutions sont inconfortables : soit on est un mutin qui mérite le peloton, soit on s'englue dans la doxa de l'idéologie dominante, les nuances étant inaudibles dans ces circonstances. 

Il nous faudra donc éviter de bêler avec les moutons et refuser catégoriquement les discours des escrocs à la BHL, Raphael Glucksmann, Bernard Guetta et les fausses évidences de l'idéologie dominante. Aiguiser notre esprit critique. Conserver la lucidité et le recul nécessaire pour imposer la nécessaire confrontation démocratique face à un pouvoir autoritaire et anti-populaire qui se trouve à l'Elysée. Le peuple russe s'occupera de celui qui est au Kremlin quand il le décidera. Ne nous laissons pas priver, enivrés de mots, de drapeaux et de mensonges, enveloppés de brouillards et d'ombres, de notre droit à choisir librement la suite de l'histoire.

 

Antoine Manessis.

 

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